Friday, May 30, 2008

Redite

Suite à une erreur de manipulation, mon article de ce jour sur l'Euro vient d'être publié deux fois de suite. Le lecteur voudra bien considérer qu'il ne s'agit pas d'une tentative d'endoctrinement abusif, mais d'une simple maladresse dans l'édition de ce blog.

Euro: Les faits sont têtus.

Les annonces inflationnistes qui se multiplient ces derniers temps donnent l’occasion à la Banque centrale européenne de s’auto-féliciter pour sa position constante d’extrême conservatisme monétaire. Mais à vrai dire l’inflation affecte principalement les pays asiatiques ou en voie de développement, plus que les Etats-Unis et bien plus que l’Europe.
La conjoncture de cette dernière reste, de son coté, marquée par la force de l’euro, malgré les dénégations répétées de ceux qui font fi de toute théorie économique pour soutenir que la cherté du change n’a pas d’impact négatif sur la croissance. A l’appui de cette idée déraisonnable la quasi unanimité des commentateurs nous assénaient, il y a quelques semaines encore, l’affirmation selon laquelle la soi-disant performance à l’exportation de l’économie allemande montrait à l’évidence que ce n’était pas la cherté de l’euro qui faisait problème mais, par contraste, l’absence de la trop fameuse « réforme structurelle » en France.

Or aujourd’hui Le Monde (29 mai 2008) finit par se résoudre à constater, dans un article intitulé « Zone euro : tous ensemble vers le ralentissement », que
«La faiblesse de l’économie américaine (le bouc émissaire permanent de nos élites pensantes et parlantes, JJR) et la force de l’euro commencent aussi à tarir les sources mêmes de la croissance, investissements et exportations de machines vers l’Europe de l’Est et l’Asie en forte augmentation. De janvier à mars, les exportations allemandes ont progressé moins vite que les importations. La locomotive de l’Europe est en train de caler ».

Et de poursuivre : « En mai, l’enquête mensuelle d’activité dans l’industrie et les services s’est inscrite à son niveau le plus bas depuis juillet 2003 ». Un fait à rapprocher du passage de la dépréciation massive de l’euro vis-à-vis du dollar de 1999 à 2002, vers une appréciation non moins massive depuis 2003.

Que de telles variations se produisent en relativement peu de temps, et affectent simultanément tous les pays de la zone, signifie clairement qu’il existe un facteur conjoncturel commun (et non pas structurel, qui par définition ne varierait pas dans des proportions importantes e quelques mois ou peu d’années) et que celui-ci, comme l’enseigne la théorie économique, est très certainement le cours du change.
Néanmoins, l’auteur de l’article conclut par l’hommage traditionnel et obligé à la Banque centrale européenne qui:
« … observe son mandat, qui est de se préoccuper de l’inflation, pas d’un ralentissement économique ».

Ne serait-il pas temps de changer quelque chose à cette constitution monétaire punitive ? D’autant que d’autre part, comme l’a écrit Sebastian Dullien dans le blog Eurozone Watch du 15 mai, « EMU divergence is becoming a mainstream issue ». Selon lui :
« … the underlying divergence in the data is rather frightening. What has for a while been one of the top issues on Eurozone Watch is increasingly taken up by bank analysts: The growing divergence within EMU.
… Exactly those countries which have shown a strong deterioration in their unit labour cost position over the past years … are now showing increasingly weaknesses.
… The interesting question is now for how long the slump for the Southern countries will last. …. These countries can count at at least half a decade, possibly more, of weak growth, growing social disparities and possibly growing political discontent with the European project”.

Comme le savent les lecteurs de mon article de juin 2002 “Les promesses de l’Euro: Tout était faux” (téléchargeable sur mon site, http://www.jjrosa.com), ou de mon livre de 1998, je n’aurais pu mieux dire.

On comprend dans ces conditions que l’éditorialiste du Financial Times, Martin Wolf, écrive ce même jour : « Britain is better off outside the euro », article qui ne peut manquer de refléter le sentiment dominant à la City. Et plusieurs passages méritent d’être cités :

« Finally, there is no evidence that being outside the eurozone has imposed a performance penalty upon the UK economy. Between the first quarter of 1999 and the first quarter of 2008, its economy expanded by 28 percent, against 21 percent in the eurozone as a whole and 16 percent in Germany… there is no evidence that Emu has improved the economic dynamism of its members. If anything, membership seems to have reduced the pressures for reform. … remaining outside the euro preserves the safety valve of currency flexibility, while losing nothing in aggregate economic performance. Being outside has not even hurt London’s position as a financial centre.
… Inside a currency union, years of slow growth will occasionally be needed if relative costs are to come back into line”.

La leçon à tirer de cette ouverture progressive des esprits à la réalité des faits est intéressante. Le raisonnement économique de base, correctement utilisé, permettait de prévoir tout cela dès le milieu des années 90. Mais la plupart des observateurs, et plus encore des acteurs politiques, ne croient pas à l’existence d’une science économique (comme beaucoup d’économistes d’ailleurs). Ils l’apprennent aujourd’hui sur le tas, par l’expérience. Mais à quel coût.

Euro: Les faits sont têtus

Les annonces inflationnistes qui se multiplient ces derniers temps donnent l’occasion à la Banque centrale européenne de s’auto-féliciter pour sa position constante d’extrême conservatisme monétaire. Mais à vrai dire l’inflation affecte principalement les pays asiatiques ou en voie de développement, plus que les Etats-Unis et bien plus que l’Europe.
La conjoncture de cette dernière reste, de son coté, marquée par la force de l’euro, malgré les dénégations répétées de ceux qui font fi de toute théorie économique pour soutenir que la cherté du change n’a pas d’impact négatif sur la croissance. A l’appui de cette idée déraisonnable la quasi unanimité des commentateurs nous assénaient, il y a quelques semaines encore, l’affirmation selon laquelle la soi-disant performance à l’exportation de l’économie allemande montrait à l’évidence que ce n’était pas la cherté de l’euro qui faisait problème mais, par contraste, l’absence de la trop fameuse « réforme structurelle » en France.

Or aujourd’hui Le Monde (29 mai 2008) finit par se résoudre à constater, dans un article intitulé « Zone euro : tous ensemble vers le ralentissement », que « La faiblesse de l’économie américaine (le bouc émissaire permanent de nos élites pensantes et parlantes, JJR) et la force de l’euro commencent aussi à tarir les sources mêmes de la croissance, investissements et exportations de machines vers l’Europe de l’Est et l’Asie en forte augmentation. De janvier à mars, les exportations allemandes ont progressé moins vite que les importations. La locomotive de l’Europe est en train de caler »
Et de poursuivre : « En mai, l’enquête mensuelle d’activité dans l’industrie et les services s’est inscrite à son niveau le plus bas depuis juillet 2003 ». Un fait à rapprocher du passage de la dépréciation massive de l’euro vis-à-vis du dollar de 1999 à 2002, vers une appréciation non moins massive depuis 2003.

Que de telles variations se produisent en relativement peu de temps, et affectent simultanément tous les pays de la zone, signifie clairement qu’il existe un facteur conjoncturel commun (et non pas structurel, qui par définition ne varierait pas dans des proportions importantes e quelques mois ou peu d’années) et que celui-ci, comme l’enseigne la théorie économique, est très certainement le cours du change.

Néanmoins, l’auteur de l’article conclut par l’hommage traditionnel et obligé à la Banque centrale européenne qui:
« … observe son mandat, qui est de se préoccuper de l’inflation, pas d’un ralentissement économique ».

Ne serait-il pas temps de changer quelque chose à cette constitution monétaire punitive ? D’autant que d’autre part, comme l’a écrit Sebastian Dullien dans le blog Eurozone Watch du 15 mai, « EMU divergence is becoming a mainstream issue ». Selon lui :

« … the underlying divergence in the data is rather frightening. What has for a while been one of the top issues on Eurozone Watch is increasingly taken up by bank analysts: The growing divergence within EMU.
… Exactly those countries which have shown a strong deterioration in their unit labour cost position over the past years … are now showing increasingly weaknesses.
… The interesting question is now for how long the slump for the Southern countries will last. …. These countries can count at at least half a decade, possibly more, of weak growth, growing social disparities and possibly growing political discontent with the European project”.

Comme le savent les lecteurs de mon article de juin 2002 “Les promesses de l’Euro: Tout était faux” (téléchargeable sur mon site, http://www.jjrosa.com), ou de mon livre de 1998, je n’aurais pu mieux dire.

On comprend dans ces conditions que l’éditorialiste du Financial Times, Martin Wolf, écrive ce même jour : « Britain is better off outside the euro », article qui ne peut manquer de refléter le sentiment dominant à la City. Et plusieurs passages méritent d’être cités :

« Finally, there is no evidence that being outside the eurozone has imposed a performance penalty upon the UK economy. Between the first quarter of 1999 and the first quarter of 2008, its economy expanded by 28 percent, against 21 percent in the eurozone as a whole and 16 percent in Germany… there is no evidence that Emu has improved the economic dynamism of its members. If anything, membership seems to have reduced the pressures for reform. … remaining outside the euro preserves the safety valve of currency flexibility, while losing nothing in aggregate economic performance. Being outside has not even hurt London’s position as a financial centre.
… Inside a currency union, years of slow growth will occasionally be needed if relative costs are to come back into line”.

La leçon à tirer de cette ouverture progressive des esprits à la réalité des faits est intéressante. Le raisonnement économique de base, correctement utilisé, permettait de prévoir tout cela dès le milieu des années 90. Mais la plupart des observateurs, et plus encore des acteurs politiques, ne croient pas à l’existence d’une science économique (comme beaucoup d’économistes d’ailleurs). Ils l’apprennent aujourd’hui sur le tas, par l’expérience. Mais à quel coût.

Sunday, May 18, 2008

Huit siècles de crises financières ...

Un très intéressant papier de Carmen M. Reinhart et Kenneth S. Rogoff pour le NBER : « This Time is Different : A Panoramic View of Eight Centuries of Financial Crises » (March 2008). Les périodes de crises sont récurrentes, elles affectent plusieurs pays simultanément, mais sont séparées par plusieurs années, voire plusieurs décennies, d’absence de crise majeure, ce qui fait que chaque nouvelle recrudescence est perçue comme un évènement entièrement nouveau.
La crise actuelle ne fait pas exception à cette illusion d’optique. Les auteurs ont rassemblé une base de données unique par son importance. On notera un premier graphique impressionnant qui montre l’évolution du pourcentage des pays dans le monde qui ont connu des crises de défaut ou de restructuration de leur dette extérieure depuis le début du XIXème siècle, avec des périodes de crise générale en 1830-40, en 1880-90, en 1940-50 et dernièrement dans les années 1990.
Les auteurs soulignent aussi que les crises bancaires sont liées aux périodes de mobilité internationale accrue des capitaux, tandis que les crises de défaut sur les dettes publiques sont corrélées aux périodes de forte inflation. A lire.

Wednesday, May 14, 2008

Trade Unions Are Right .... At Least British Ones

Andrew Watt, a senior researcher at the European Trade Union Institute, has written a very good analysis of the “consensus view” on what to do about the European economy (The Financial Times, May 12, 2008). Faced with the unpleasant combination of above-target inflation and growth decelerating markedly below the potential rate, the European Central Bank has clearly insisted on its priority: fight inflation. Unlike other central banks it has refused to cut rates while monetary and lending conditions by banks have significantly tightened.

The European Commission is starting to worry about budget deficits – again. Business leaders complain about “high wage demands” and ask for more fast-track labour market reform – again.
Policymakers in general worry about the threat to competitiveness from wage increases – consistently running at between 2.5 to 3.5 a year, when the euro has appreciated by about 20 per cent in just four months due to different monetary policies on the two sides of the Atlantic.

The conclusion seems clear: Shouldn’t the ECB worry more about the true danger, its own policy?