Il aura fallu un peu moins de dix ans pour que les vérités économiques élémentaires commencent à être reconnues par les journalistes, les politiques, et les économistes. A commencer par la première d’entre elle : « l’euro, pas plus d’ailleurs qu’une autre monnaie, ne saurait rester durablement surévalué sans porter atteinte aux forces économiques des pays qui l’ont adopté ». Dixit l’éditorialiste du Figaro, Nicolas Barré (23 avril 2008). Qu’en pensent la plupart des économistes français qui ont nié obstinément depuis plus de 15 ans que le franc fort, puis l’euro fort, puissent ralentir la croissance ? On aimerait entendre aujourd’hui l’analyse du propagandiste officiel de l’euro, M. Thibault de Silguy, devenu président d’une grande société commerciale, qui nous assurait – contre toute raison - que l’euro constituerait à l’avenir un bouclier contre les aléas de la conjoncture et contre les errances de la bourse. Comme je l’écrivais en juin 2002 (« Les promesses de l’euro : tout était faux », disponible sur mon site http://www.jjrosa.com, et voir également mon livre de 1998, L’erreur Européenne.) ce mot d’ordre « appartenait au domaine du fantasme et de l’attrape-nigauds ». On aimerait avoir aussi la réaction de Jean Boissonnat, chantre de la monnaie unique qu’il paraît de toutes les vertus, et celles aussi de tous les économistes professionnels qui ont égaré l’opinion par des débats techniques sur le calendrier administratif de mise en place de la future monnaie, sur les risques de manque de « crédibilité » de la future banque centrale, sur l’impuissance de la politique monétaire et l’absence d’impact des taux de change sur l’activité économique, sur la nécessité de centraliser toutes les politiques macroéconomiques, y compris budgétaires, pour pérenniser l’euro, tout ce brouillard de considérations oiseuses pour éviter de débattre des vraies questions, celles des effets d’une monnaie unique et non optimale sur la croissance réelle. Mais ne citons pas de noms, il y en aurait trop…
Bien sur, habitude oblige, le journaliste du Figaro attribue les difficultés actuelles résultant de l’euro cher … à l’évolution de l’économie américaine. Mais qu’a fait, pendant la longue baisse du dollar, la Banque centrale européenne pour modérer l’essor de l’euro ? Va-t-on nous dire encore qu’elle ne peut agir en rien sur le prix du change ? A-t-elle moins de pouvoir sur la monnaie que la Réserve Fédérale ?
Un de mes collègues a probablement mis le doigt sur le vrai problème et la raison de l’acharnement thérapeutique de la BCE : peut-on, me demandait-il récemment, faire baisser l’euro sans toutefois réduire les taux d’intérêt d’intervention? La réponse est assez clairement négative, mais c’est la question qui est révélatrice : pourquoi la banque centrale européenne refuserait-elle toute baisse de ses taux d’intérêt ? Pour prévenir un regain de l’inflation dira-t-on. Mais en tout état de cause une baisse du change relativement au dollar, même obtenue sans baisse du taux d'intérêt si cela était possible, aurait le même type d’effet sur le prix. Il faut donc conclure que la BCE a une véritable préférence pour l’argent cher. Pourquoi ? Il y aura une prime pour la meilleure réponse.
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