Jeudi 6 mai 2010
Q - La Grèce a-t-elle intérêt à sortir de la zone euro?
R - Je ne vois pas d'autre solution. La monnaie unique n'a jamais été une bonne chose pour la Grèce, l’obligeant à suivre une politique monétaire qui ne lui convenait pas. La privant de la possibilité de dévaluer, elle lui a fait perdre en compétitivité à l’exportation. La crise actuelle aggrave encore les choses. Pour s'en sortir ce pays doit abandonner l'euro pour dévaluer sa monnaie et regagner ainsi en compétitivité, et donc en croissance.
Q - Le plan préconisé par le FMI et les Européens ne permettra pas d'endiguer la crise?
R - L’argent prêté ne servira à rien. La faillite, au moins partielle, de la Grèce est programmée. La rigueur prônée par le FMI et les Etats européens va aggraver la crise économique par la déflation, la réduction des dépenses publiques ayant pour effet de ralentir plus encore l'activité, et donc de réduire aussi le niveau des recettes publiques. L’endettement public sera accru. C'est une politique sans issue.
Q - Quelles conséquences la crise grecque va-t-elle avoir sur la zone euro?
R - Une sortie de l'euro ne devrait pas entraîner de conséquences importantes pour les autres pays de la zone. Une faillite de l’Etat, même partielle, posera des problèmes à certaines grandes banques, notamment françaises et allemandes, qui ont souscrit des obligations grecques. Mais, ces établissements devraient être en mesure de faire face à ces pertes, dans des conditions à négocier. Pour l'heure, la crise Grecque a aussi ses bons cotés puisqu'elle permet de faire baisser l'euro face au dollar, ce qui soutient l’activité dans la zone.
Q - Selon vous cette crise marque l'échec de l'euro?
R - Oui, c'est la reconnaissance de l'échec de la monnaie unique. Certains pays - dont la France dont la compétitivité est pénalisée depuis plusieurs années par un euro surévalué - auraient intérêt à l'abandonner. Cette crise montre bien qu’une monnaie unique est une mauvaise idée pour des pays économiquement très différents. Il serait peut-être possible de maintenir une zone «rétrécie» entre Etats qui ont des conjonctures et des taux d'inflation assez proches. Ce serait éventuellement le cas d’une «zone mark» qui regrouperait autour de l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Autriche, ou le Danemark, si ces pays le souhaitent.
Q - Pourtant depuis le début de la crise financière, de nombreux économistes pointent le rôle protecteur de l'euro...
R - Les faits ont totalement démenti cette prétention qu’aucun raisonnement valable n’a jamais justifié. L'euro ne nous a protégé ni de la crise économique, ni de la crise financière, que nous avons subi tout comme les pays qui ne sont pas dans la zone. Notre croissance n’a pas été meilleure que celle des autres, bien au contraire, et les signes de reprises sont moins forts qu’aux Etats-Unis ou dans certains pays européens non membres de l’euro.
Propos recueillis par Valérie Hacot
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